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Fiche pièce
Bouge de là



L'AUTEUR
Zang Marcel



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L'agenda du moment autour de la personne/l'oeuvre

 

 
 
 
       
       
       
Bouge de là
Zang Marcel

Ces fiches sont soumises au respect de la propriété intellectuelle.
Fiche réalisée par Cyrielle Martel, étudiante Univ. Paris 3, SeFeA


  Cameroun
2002
Actes Sud Papiers
 
Genre
Comédie

Nombre de personnages
7 hommes
Figurants noirs et arabes (hommes et femmes) Figurants blancs (policiers)

Longueur
1 acte
23 pages


Temps et lieux
Région parisienne, dans le sous-sol d'un commissariat de police, de nos jours.

Thèmes


Mots-clés
 
 

  Consultation de la fiche par rubriques
 

Un premier repérage : la fable
Résumé de la pièce

Parcours dramaturgiques
Analyse dramaturgique qui fait apparaître l'originalité de la structure et son fonctionnement général par rapport à l'espace, au temps, aux personnages, etc.

Pistes de lecture
Analyse plus philosophique et poétique, voire linguistique qui permet de dégager une interprétation et les véritables enjeux de la pièce

De plain-pied dans le texte
Un extrait

Du texte à la scène
Petite histoire de la pièce de ses conditions d'écriture à sa création en passant par les lectures dont elle a pu faire l'objet

Pour poursuivre le voyage
Extraits de presse ou d'entretien au sujet de la pièce

 
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Un premier repérage : La fable

L'univers carcéral s'impose une nouvelle fois dans cette seconde pièce de Marcel Zang. Contrairement à L'Exilé qui opposait deux personnages (un étranger et un inspecteur), Bouge de là met face à face deux groupes (les immigrés menacés d'expulsion et des policiers). Des hommes et des femmes étrangers, pour la majorité d'origine africaine, sont en attente d'être expulsés du territoire français. Un immense noir, surnommé "le grand Georges" (que l'on retrouvera dans La danse du Pharaon), provoque un incident en urinant de sa cellule jusqu'aux pieds d'un policier. Une enquête est alors menée par le brigadier-chef autour de la flaque d'urine pour trouver qui est le coupable. Des analyses d'urine sont effectuées, la victime et le suspect sont soumis à un interrogatoire. Le brigadier-chef maîtrise l'art de la dissimulation. Derrière sa manière optimiste de voir le sort des détenus se cache une hâte irrépressible de les voir tous exilés. Bol d'Air, un policier-poète vient offrir un peu de poésie aux immigrés. Malgré les encouragements du brigadier-chef de peindre la situation sous un jour optimiste, Bol d'Air est incapable de faire l'éloge des immigrés entassés les uns sur les autres. Un lien étroit se noue entre le poète et Georges, tous deux écrasés par un système autoritaire qui les empêche de jouir d'une totale liberté. Le départ pour l'exil approche et le brigadier souhaite tout le bonheur du monde à Georges, en espérant qu'il ne regrettera pas la France qui lui a tant apporté.

 
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Parcours dramaturgiques

Un temps pour rire, un temps pour se questionner
Cette micro-pièce a pour but premier de faire rire le lecteur. C'est le rire qui va déclencher chez nous une réflexion sur notre société, et sur le système réglementaire de l'institution française. La parole de l'autorité est tournée en ridicule, les situations sont hilarantes, comme le montre le passage de l'inspection de la flaque d'urine à la manière d'une inspection des lieux d'un crime. De plus, Marcel Zang enchaîne les jeux de mots. Par exemple, le personnage de Bol d'Air aide les détenus à "respirer" en récitant des poèmes de Baudelaire (d'où lui vient son nom), mais lui-même a du mal à respirer dans le commissariat. Ce personnage qui vient apporter un "bol d'air" devient une allégorie de l'art : il ne peut pas s'épanouir dans un univers hermétique. Il interroge en outre le lecteur sur la place et l'utilité de l'art dans un monde qui ne laisse aucune place à l'imaginaire, où tout est défini par des limites à ne pas franchir. Avec cette comédie grinçante, Marcel Zang ne nous donne pas de réponse, mais son écriture cherche à faire réagir le lecteur, à le déranger.


Confrontation entre deux collectivités dans un seul espace
Nous sommes face à deux collectivités s'affrontant à travers les deux personnages principaux : Georges et le brigadier-chef. En ce sens, Georges est le porte-parole des immigrés, il dénonce ouvertement le rapport qu'entretient la France avec les étrangers. Il insiste sur le manque de respect que montrent les "blancs" à son égard, et tous les détenus approuvent ce qu'il dit. Le brigadier-chef, quant à lui, représente l'autorité de l'institution française, il parle aux policiers comme un maître d'école s'adressant à ses élèves. Dans la pièce, chaque policier est anonyme avant d'être nommé par le brigadier. Les détenus sont également dans l'anonymat et constituent une masse compacte. Nous nous retrouvons ainsi devant deux masses confrontées l'une à l'autre dans un espace restreint. Une pièce nue, où l'on distingue, au fond, les grilles de deux cellules contigües. La scène se déroule dans un laps de temps très court, proche du temps de la lecture/représentation de la pièce. Les deux masses qui s'affrontent dans ce espace clos sont appelées "le chœur des hommes" et "le chœur des policiers" et sont chacune dotées d'une parole musicale.

 
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Pistes de lecture

Un auteur prisonnier de la langue française
Marcel Zang a une relation particulière avec la langue qu'il parle : la langue française. Il s'agit d'une langue qu'il maîtrise parfaitement mais qui n'est pas sa langue maternelle. Il se sent prisonnier de cette langue trop rigide, et peut-être trop "blanche" pour lui. C'est une langue qu'il emploie malgré lui. Derrière les mots de la langue française se trouve un passé occidental qui ne lui appartient pas, et qu'il rejette. Dans Bouge de là, la parole poétique sert de moyen d'émancipation à l'auteur. En effet, cette parole vient d'un ailleurs, et Marcel Zang possède alors une liberté d'expression qu'il ne trouve pas au sein de la langue française. Cette parole poétique permet à l'auteur d'inventer une nouvelle langue, ce qu'il accomplira parfaitement dans La danse du Pharaon à travers la voix mystérieuse du travesti Indien.

Une écriture de la dualité
Dans cette pièce ainsi que dans L'Exilé et dans La danse du Pharaon, l'auteur explore la dualité à travers plusieurs oppositions possibles : noir et blanc, homme et femme, homme et animal, dedans et dehors, immigrés et policiers, poésie et théâtre, vulgarité et langage formel. Marcel Zang utilise une écriture de l'entre-deux. Il brise les frontières posées par l'Occident. C'est une écriture hybride qui est porteuse d'un passé contenant une grande part d'imaginaire, et qui s'inscrit dans une quête identitaire.

 
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De plain-pied dans le texte

LE BRIGADIER-CHEF (d'un mouvement, il fait reculer ses hommes) : Laissez-le respirer. Alors, Bol d'Air ? Qu'est ce que tu vois ? Vas-y, n'aie pas peur, tu es libre de voir ce que tu veux, tu as mon autorisation.

BOL D'AIR : Je vois un bateau… oui, un bateau. Avec des hommes au dessus et encore plus d'hommes, de femmes et d'enfants en dessous.

LE BRIGADIER-CHEF : Oui… et ensuite ?

BOL D'AIR : Je vois les cales d'un bateau, et dans ces cales du sang noir battu par un fouet blanc… Je vois les cales d'un bateau, et dans ces cales des enfants, des hommes et des femmes enchaînés… Je vois les cales d'un bateau, et dans ces cales de la sève et des alliances brisées… Je vois les cales d'un bateau, et dans ces cales un peuple broyé pour un festin amer… Je vois les cales d'un bateau hurlant à la soif, au silence, à la mort… Je vois les cales d'un bateau cinglant vers des rivages sans retour… Je vois les cales d'un bateau où rôdent la souffrance, l'exil et l'oubli… Je vois les cales d'un bateau voguant vers les ténèbres… Je vois la gueule d'un bateau, et c'est un bateau de négriers, des esclavagistes, lit-on sur les tombes.

LE BRIGADIER-CHEF : Ca suffit ! Voyons, Bol d'Air ! Qu'est ce qui te prend ? Tu as perdu la tête ? Personne ne te demande tes opinions, tout le monde est capable d'en avoir. On te demande simplement de dire ce que tu vois vraiment, ce que tu sens profondément, quelque chose qui soit au dessus de la masse, pas quelque chose de terre à terre ou de politique. Je vous ai déjà dit que je ne veux pas de politique dans mon commissariat. Alors un peu de sérieux !

BOL D'AIR : Chef, vous m'avez dit que j'étais libre de voir ce que je voulais.

LE BRIGADIER-CHEF : Libre… Tu connais quelqu'un de libre ? Personne n'est entièrement libre. Tu le sais pourtant. On dit : la liberté des uns finit où commence celle des autres. C'est bien connu, et c'est pour cela qu'il y a des lois et que nous sommes là pour les faire respecter. Vas-y, recommence. Qu'est ce que tu vois ? A quoi te font penser nos expulsés là sous les yeux ? Quand tu prends en compte que ce sont des rapatriés qui vont se retrouver dans quelques heures au soleil, sur leurs terres, leurs patries, auprès de leurs chères familles. Bol d'Air, essaie de trouver quelque chose, on ne va pas y passer la journée. Trouve une image comme tu sais le faire. Une belle image.

Marcel Zang, Bouge de là, Actes-Sud-Papiers, 2002, p.103-104.

 
 
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Pour poursuivre le voyage


Du texte à la scène
Pièce mise en voix le 8 mars 2002 à Rennes, lors du colloque sur les nouvelles dramaturgies d'Afrique noire.
Pièce créée le 18 juin 2002 au Manège (La Roche-sur-Yon), par la compagnie Espace Universalisapo, dans une mise en scène de Georges Bilau Yaya.
Pièce mise en espace le 6 octobre 2002 au Festival International des théâtres francophones, à Limoges, par Patrick Le Mauff.
Pièce mise en scène par Kazem Shahryari à l'Art Studio Théâtre du 12 décembre 2014 au 28 février 2015, avec Kader Afroun, Moïse Conde, Dominique Darcel, Lucien Jaburek, Armane Shahryari :
http://artstudiotheatre.org/Bouge-de-la-de-Kazem-Shahryari-et-Marcel-Zang.html

Bibliograhie
"Ecrire c'est plonger dans l'inconnu" entretien avec Marcel Zang. Propos recueillis par Sylvie Chalaye, Africultures, n°52, novembre 2002.

"La danse de l'écriture" par Sylvie Chalaye, in L'engagement de l'écrivain africain, Africultures, n°59, mars 2004.

 
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Fiche réalisée par Cyrielle Martel, étudiante Univ. Paris 3, SeFeA

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